PUNAAUIA, jeudi 17 octobre 2013 : L’"Etat Pakumotu" annonce pour le 30 octobre 2013 la mise en circulation d’un milliard de Patu, une monnaie de sa fabrication dont le taux de change est annoncé à 145 Fcfp l’unité.
On serait tenté d’y voir une blague ; mais l’annonce est faite avec sérieux par un groupe politiquo-sectaire qui s’illustre depuis 3 ans dans le domaine des revendications de terres et qui s'adresse à la crédulité des Polynésiens les plus démunis. Groupe dont le leader, un fantasque souverain sexagénaire autoproclamé, a été condamné en 2012 pour escroquerie et falsification de documents administratifs après avoir commercialisé des cartes d’identité et des permis de conduire fabrication "Pakumotu".
Le parquet de Papeete a ouvert une enquête suite à l’annonce de la mise en circulation de cette "monnaie". "On va voir si les billets sont édités. Ils seront alors saisis et détruits", prévient Procureur de la République française - la précision s'impose : les Pakumotu ont également leur Procureur, ministre de la Justice, des affaires intérieures, extérieures et porte-parole du roi...
"On ne laissera ni imprimer, ni diffuser des signes monétaires n’ayant pas cours légal. C’est un délit passible de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende", menace José Thorel. "En Polynésie française, la seule personne habilitée à mettre en circulation de la monnaie est l’IEOM (l’Institut d’émission d’outre-mer, ndlr)".
L’annonce de la mise en circulation de cette monnaie de fabrication artisanale a été faite jeudi matin alors qu’un groupe de "dignitaires" Pakumotu tentait de pénétrer sur un terrain domanial à Outumaoro, pour procéder à la commémoration du troisième anniversaire de l’accession au trône de leur souverain, un certain Teiri Athanase qui se fait aujourd’hui appeler Roi Taginuihoe.
"Le Roi est là pour les soulager"
Le Hau Pakumotu est une monarchie républicaine polynésienne autoproclamée indépendante le 2 juin 2010, et qui revendique sa souveraineté sur la Polynésie française dans son intégralité.
Le Roi Taginuihoe apparaît en public sceptre en main, couronné de nacre et vêtu d’un costume carnavalesque avec cape dorée, écharpe vermeil et longue tunique blanche. Jeudi il portait aussi de vieilles chaussures de sport noires à scratch.
Ford Explorer blanche à vitres teintées, chauffeur, gardes du corps et assistants de toutes sortes : Taginuihoe ménage sa superbe au moment de se retirer. Après avoir vainement tenté de négocier avec les forces de l’ordre, par le biais de son porte-parole, pour entrer sur le terrain domanial de Outumaoro, jeudi, la décision de lever le camps a été prise par le souverain autoproclamé vers 10 h 30.
Et pour quitter les lieux la tête haute, une amnistie générale a été déclarée par son ministre de la Justice : "Toutes les dettes, les condamnations judiciaires, les emprunts bancaires sont annulés à compter de ce jour". L’annonce a fait belle impression et a été applaudie par la cinquantaine de sympathisants présents. Mais là encore, il semble que "les promesses n’engagent que ceux qui les croient".
"La plupart ne travaillent pas. Il y en a qui vivent dans la rue, d’autres se sont fait expulsés de chez eux et se trouvent au bout du rouleau, avec des dettes", explique très sérieusement Nani Faari, ministre des Affaires administratives de la monarchie républicaine Pakumotu. "Le Roi est là pour les soulager", ajoute sans ironie la trentenaire.
Espérons que ce ne sera pas du peu qu'il leur reste encore : le billet de 100 Patu est annoncé d'une valeur de 14 500 Fcfp.